Siméon Ndaye K. | June 2025
La République Démocratique du Congo est plongée dans une crise politique profonde, où l’autoritarisme, la fragmentation institutionnelle et le délitement des mécanismes démocratiques compromettent l’avenir du pays. La répression des libertés, l’échec des médiations internes et l’impasse sécuritaire dans l’Est dessinent les contours d’un régime en perte de légitimité, tandis que l’opposition peine à s’unir face à l’urgence nationale. Dans ce contexte complexe, une figure se retrouve désormais au centre de tous les regards : Moïse Katumbi.
Depuis la réapparition politique de Joseph Kabila, la crise congolaise s’est clarifiée dans sa structure : elle est désormais bipolarisée. D’un côté Kinshasa, symbole du pouvoir de Félix Tshisekedi, usé par les dérives sécuritaires, les atteintes aux libertés fondamentales et une gouvernance opaque. De l’autre, Goma, devenue métaphoriquement le pôle d’un contre-pouvoir incarné par Kabila, mais aussi, potentiellement, par toute une opposition que l’histoire interpelle.
Dans ce chaos, le régime Tshisekedi continue de gouverner par la force, réprimant la presse, muselant l’opposition, et sabotant les initiatives de réconciliation. Les tentatives de médiation menées par la CENCO ont été sciemment torpillées. En préférant des postures ambiguës ou des accords de convenance avec Tshisekedi, des figures comme Martin Fayulu ou Denis Mukwege ont affaibli la crédibilité d’un front commun capable d’imposer un véritable changement. En réalité, ces attitudes ont offert un répit stratégique à un pouvoir discrédité, sans contrepartie démocratique.
Dans ce vide, Katumbi apparaît comme l’une des dernières figures capables de fédérer une alternative crédible. Depuis des années, il s’est positionné comme une alternative réformiste, moderne et rassembleuse — sans toutefois avoir jamais reçu les clés du pays. L’Histoire lui tend aujourd’hui l’opportunité de démontrer sa capacité à incarner un cap, à rassembler les forces éparses, à mobiliser une nation en souffrance, et à assumer pleinement son rôle de leader.
Mais ce rôle implique des choix clairs. Il ne pourra demeurer dans l’entre-deux sans assumer tôt ou tard les conséquences de l’histoire. Seul un engagement ferme en faveur d’une transition démocratique inclusive, appuyée par un dialogue sincère avec les autres forces d’opposition — y compris Joseph Kabila — permettra de tracer une nouvelle voie.
Car malgré les polarisations, l’heure n’est plus aux divisions stériles ni aux égoïsmes partisans. L’intérêt supérieur de la nation exige une convergence des voix dissidentes pour sortir la RDC du marasme, de l’instabilité, et de la tyrannie. Kabila, en reprenant la parole, s’est replacé comme un acteur incontournable. Une concertation entre lui et Katumbi, loin d’être une compromission, pourrait devenir l’acte fondateur d’un nouveau pacte citoyen.
Moïse Katumbi est donc face à l’Histoire. Il peut devenir l’architecte d’un sursaut national ou rester le témoin passif d’un naufrage annoncé. Son choix définira non seulement son héritage politique, mais aussi le sort d’un peuple en quête de dignité, de justice et de paix.